Jean Giraudoux, sportif Limousin

Le Sport, notes et maximes : la course à pied

 

Texte de Jean Giraudoux

 

 

Jean Giraudoux est né à Bellac en 1882. Il entame une carrière dans la diplomatie, tout en écrivant de nombreux récits à caractère romanesque, où ses souvenirs du Limousin et du Berry tiennent une grande place, puis des pièces de théâtre. Il rencontre Louis Jouvet avec lequel il monte ses pièces, comme « Ondine » ( 1939 ). Giraudoux a été souvent présent en Corrèze, pendant les étés, entre 1925 et 1938, à Sornac, où il venait voir sa cousine Jeanne Lacoste qui avait épousé Jules Chamboux, un corrézien. Ainsi l'acte II d’« Ondine » a été écrit par Giraudoux à Sornac, en 1938. Jean Giraudoux est mort en 1944 à Paris.

 

Jean Giraudoux est l’un de ces écrivains qui ont marqué un vif intérêt pour le sport, et qui, ayant pratiqué diverses disciplines sportives, ont écrit, avec beaucoup d’intelligence, sur le sport ; voici comment, dans un ouvrage publié en 1928 (Jean Giraudoux. Le sport [collection Notes et Maximes], Paris, Librairie Hachette, 1928), l’écrivain limousin s’exprime sur la course à pied :



 

Starter : on n’a encore trouvé que le revolver pour faire partir le projectile humain à sa plus grande vitesse.

 

On appelle miracle quand Dieu bat ses records.

 

Quand tu rentres chez toi après avoir battu ton record, tu rentres avec un vainqueur et un vaincu. Tu vois que les défaites sportives ont du bon.

 

Une indissoluble amitié lie, dans les clubs sportifs, le champion qui arrive constamment premier et le champion qui arrive constamment second, celui-ci par l’admiration, celui-là par la générosité. Aucune chaîne plus puissante que ce demi-mètre de vide. Pylade était quelqu’un qui sautait un peu moins haut qu’Oreste, et Patrocle quelqu’un qui était toujours battu d’une poitrine par Achille.

 

La vraie course ne va pas d’un point à un autre, mais d’un point au même point.

 

La piste est l’image de l’infini, sur lequel chaque coureur découpe sa distance favorite.

 

Les Français poussent un peu loin leur passion du système métrique et de la logique : ils n’ont eu, en records du monde de course à pied, que ceux du kilomètre et de l’heure.

 

J’aime couper de sprints ma marche vers la mort.

 

Dernier virage : le coureur entre dans la fatalité.

 

Quel mur épais, à la fin de la course, forme devant le champion cette combinaison d’espace et de temps… Après le fil de l’arrivée, il bascule, il tombe dans le vide.

 

La sensation la plus vive du coureur au milieu des trois cents coureurs qui partent et courent avec lui : l’isolement.

 

Jean Bouin battit le record de l’heure, puis, quelques années plus après, mourut devant l’ennemi. Cet exploit et cette mort se touchent maintenant d’aussi près que l’arrivée et la mort du soldat de Marathon.

 

Pourquoi la belle ellipse que décrit le champion autour de sa piste a-t-elle généralement deux énormes photographes pour foyer ?

 

La course à pied est aux autres sports ce que la géométrie est aux autres sciences. »

 

 

Merci à Pierre GANDOIS qui a réalisé l'introduction et la compilation de ces citations.

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